Quand l'anodin devient une information

Narcisse Tomèty: ” L’Afrique est à l’ère de la démesure, de la grandiloquence, de l’arrogance et du maquillage”

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Les pays africains s’apprêtent à célébrer leurs indépendances. Occasion pour le Directeur du Café Africain des néo-philosophes de faire le point. Mais pour Simon Narcisse Tomèty, plus de cinq décennies après, l’Afrique est à la traîne, car martèle t-il ” l’Afrique est à l’ère de la démesure, de la grandiloquence, de l’arrogance et du maquillage”. La faute, selon lui, à des loups déguisés en des hommes normaux. Dégustation!!!

” Les deux faces de la guerre : essai sur la force des idées

L’Etat de droit sans droiture est devenu un mode de gouvernance en Afrique et le terreau sur lequel pousse le terrorisme parce que nos territoires sont gravement malades. La politique se permet tout, les jeunes désespèrent et croient de moins en moins aux gouvernants et à leur avenir.

L’Afrique se meurt même si des gadgets d’infrastructures détournent le regard de la profondeur du malaise. Le mal-être est le mode de vie le plus partagé en Afrique, à l’exception de ceux qui ont trouvé des créneaux pour l’exploitation de l’homme par l’homme et qui ne sont plus les autres d’hier mais certains des nôtres.

Nous sommes dans un drame perpétuel et à une année des indépendances cueillies, on se demande si un mauvais sort est définitivement jeté sur certains Etats africains. Pendant que le nombre de gradués en droit ne cesse de croître, le nombre de cas d’injustice s’enfle de jour en jour. Notre malheur, c’est que de vrais sages sont en train de s’en aller laissant partout les citoyens dans les gueules des loups déguisés en des hommes normaux.

Peut-on permettre de saluer ce qu’en dit Platon : « La justice de l’intelligence est la sagesse. Le sage n’est pas celui qui sait beaucoup de choses, mais celui qui voit leur juste mesure. » L’Afrique est à l’ère de la démesure, de la grandiloquence, de l’arrogance et du maquillage. Elle ne parvient pas à s’échapper des ténèbres. Donnons simplement raison à Confucius quand il considère que « la conscience est la lumière de l’intelligence pour distinguer le bien du mal. »

L’Afrique mérite-t-elle d’être un champ de ruine ? Elle a résisté à la traite négrière, à la colonisation et ses travaux forcés, à post-colonisation et au pillage de ses matières sur un marché dit mondial qui la mondialise dans les assiettes, les pharmacies, les habillements, les habitats, les équipements militaires, l’éducation nationale… Les gouvernants africains ont intégré la mondialisation comme une stratégie de renforcement de la recolonisation avec des intérêts acquis pour certains des dirigeants qui se fichent pas mal de la misère de leurs peuples.

La volonté de changer l’image de l’Afrique dans le monde est un leurre assez lisible dans chacun de nos Etats. Plus grave dans certains pays, les peuples sont dressés comme des chiots surveillés par des chiens de garde. Une volonté d’émancipation trompeuse à travers une modernité de façade avec des lois arbitraires qui ne protègent principalement que les forts.

Mais qu’est-ce que la volonté ?

La volonté de l’homme est dans son surpassement et sa foi. C’est ce qui élève l’homme comme le levain qui active la pâte pour le pain. Il n’y a de volonté que de capacité à défier son destin en lui prescrivant le salut quotidien d’où surgira la concrétisation de son rêve par le combat quotidien.

Notre seul rêve après six décennies c’est malheureusement la quête de la LIBERTE et de la PAIX dont nous sommes toujours privés par les dictatures africaines. Simplement parce que la volonté de ces dictateurs de faire la guerre à leurs compatriotes est devenue la première fonction de célébrité et de puissance tutélaire. Pour eux, faire la guerre à leurs peuples, c’est simplement faire du BUSINESS. La paix les dérange et les trouble.

J’emprunte à Victor Hugo cette sagesse que j’invite tous les Africains à méditer. « La guerre, c’est la guerre des hommes. La paix, c’est la guerre des idées. »

La guerre des hommes est la poursuite d’intérêts égoïstes de positionnement et d’accumulation du bien commun en détruisant tous les obstacles permettant l’accaparement et l’impunité des princes. Ils sont au-dessus des lois et c’est les seuls qui sont véritablement protégés. Et comme approche d’illusion d’invulnérabilité, ils ont recours au militarisme pour organiser des exclusions de leurs compatriotes influents. La force brutale est utilisée pour neutraliser toutes les résistances intérieures et tout ce qui bouge comme vie humaine. On en est là, hélas! Voilà le visage des Etats de droit sans droiture en Afrique, 60 ans après.

La guerre des idées vaut plus que tout parce qu’elle traduit une volonté de recherche et de reconnaissance de la VERITE par le DIALOGUE et le COMPROMIS au bénéfice du VIVRE ENSEMBLE par l’inclusion et l’interaction positive. En somme, seul le pardon est bénéfique et sain pour l’homme et la communauté.

Le pardon est une danse d’amour qui consacre le deuil de la guerre des hommes pour célébrer la paix, le seul bébé commun, fruit de la guerre des idées. Sans une confiance retrouvée issue d’un dialogue sincère et décomplexé, la paix sera une peine perdue, la bonne foi un leurre. Selon Baruch Spinoza, « la Paix n’est pas l’absence de guerre, c’est une vertu, un état d’esprit, une volonté de bienveillance, de confiance, de justice. »

La paix est la lumière des sages, la guerre est l’astuce échappatoire des hommes qui s’égarent et n’ont plus de repères pour rétablir ce qu’il y a de vital dans l’existence humaine.

J’invite chaque Africain à faire de la néo-philosophie africaine le chemin de la conquête de l’Afrique pacifiée offrant un destin commun à tous les peuples africains par-delà la diversité des nationalités et des aires sociolinguistiques. La philosophie est un gouvernail d’ordre spirituel, un outil extraordinaire de navigation à l’intérieur de soi, sur la terre, les airs et les mers et qui oriente sur l’état du monde et les causes profondes de ses perturbations. La philosophie est la vitrine de l’insatisfaction et des peurs des peuples, le reflet de ce que vaut la gouvernance de chaque pays au-delà de ces faux indicateurs économiques qui mesurent la souffrance et incapables d’appréhender la valeur humaine.

Une autre Afrique est encore possible. Il faut agir vite et maintenant. Telle est ma conviction.

Simon Narcisse Tomèty

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