Quand l'anodin devient une information

Patrice Talon ou le sacre d’un discours afro-optimiste

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“Calé ce soir sur mon divan de fortune, les yeux foncièrement enfoncés dans l’écran de ma télévision, j’ai pu déguster avec réalisme et intérêt particulier le dernier discours du premier mandat du Président de la république sur l’État de la Nation. Loin d’un ton dithyrambique, loin d’une messe de célébration d’autosatisfaction, Patrice TALON a sacrifié au devoir républicain à cette veille de la solennité des 60ans d’indépendance du Bénin. Dans une adresse teintée d’exhortation et fermeté, le Chef de l’État béninois, a invité ses concitoyens à sortir de l’euphorie collective des indépendances pour se mettre résolument au travail, d’où nous viendront le salut et la prospérité tant rêvés les yeux ouverts, la torche en main.

En qualifiant, par humilité, ses éloquents exploits de développement réalisés en bientôt cinq ans, de << résultats éphémères >>, le chantre du Nouveau Départ a lancé un cri d’alerte au peuple africain, par delà les Béninois. Malgré les multiples aversions qui soumettent le continent africain à diverses difficultés de développement après 60ans de souveraineté, un pan non moins négligeable de son allocution établit le postulat que << la pauvreté n’est pas une fatalité dont ne peuvent se soustraire les peuples d’Afrique>>. N’est-il pas là un Patrice TALON, reconnaissant lui-même la rigueur ultra manifeste implémentée à sa façon de gouverner le Bénin, qui nourrit un meilleur rêve pour l’Afrique à l’ombre de cette poésie de mots évocateurs?

Sans doute, ce segment de phrase sonne comme un rêve prémonitoire et pénétrant d’une Afrique nouvelle. Une nouvelle Afrique d’où jaillira, telle une plante verte d’un humus fertilisant, une véritable éclosion des idées émancipatrices. Une Afrique digne et fière qui doit rappeler à chaque africain que l’âge d’or de son histoire lointaine et la volonté de sortir des sentiers battus ne sont pas un mythe. Encore moins une utopie de Thomas More. En réalité, Patrice TALON a inoculé à chaque citoyen d’Afrique, le rêve en couleurs d’une Afrique debout qui tient son destin, qui doit comprendre que le sang de son peuple n’est pas de l’eau trépide.

Une Afrique débarrassée de cette histoire esclavagiste unique, d’image honteuse et tragique qu’on lui dessine souvent dans les médias occidentaux. Ce discours assez afro-optimiste, comme une force tellurique, vient soutenir la conviction que plus aucun requin venu de l’extérieur ne dévorera l’espoir africain si nous nous nous engageons, avec abnégation et sacerdoce dans le travail sans relâche. Personnellement, après m’être saoulé les tympans d’un tel discours bâti au fond sur un socle panafricain, in sitou, j’ai sécrété la pleine assurance qu’il est idéologiquement croyable et humainement nécessaire de noyer l’envie traditionnelle qu’éprouve un si grand nombre de jeunes africains. Celle d’abandonner le continent pour la migration vers l’hexagone, au nom du mirage.

Sans aucune obstination partisane à vouloir flatter le Chef de l’État béninois, nous, frères et sœurs de la mère Afrique, devrons comprendre par les mailles de l’adresse de Patrice TALON, qu’il est temps de nous départir de l’éducation égoïste et attentiste que nous sommes entrain de recevoir du monde. A l’inverse de cette renonciation, il s’impose la nécessité de cultiver au quotidien l’éthique et la probité morale caractéristiques de la civilisation nos pères. Notre développement ne se mesurant pas à l’aune du mimétisme intégral ou de ce que Tahar Benn Jelloun appelle ”le complexe de colonisabilité”, demeurons nous-mêmes avec notre identité, nos racines, notre éducation, et surtout le sacre de nos religions. Proscrivons-nous également de nous faire croire que << tout est prioritaire> alors qu’objectivement, il n’en est rien.

La preuve comme dit le sage, quand on se réveille le matin, même s’il y a mille et une priorités, l’on commence par se laver le visage. Rendons enfin grâce d’être africains. C’est une fierté, un don inestimable qui doit nous rendre heureux et non complexés en face des autres races de la planète, comme me le chante Kinoss DOSSOU dans nos devises habituelles sur l’avenir des us et costumes des arts Vodoun. Sans hésitation, Patrice TALON l’a rappelé en filigrane au détour de son discours sur l’État de la Nation béninoise, qui célèbre autant que ses pays frères, les Noces de Diamant des indépendances en Afrique francophone noire. Suivez mon regard!”

Noé Kassius DOTOU

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