Au Gabon, Raymond Ndong Sima a été nommé hier Premier ministre de transition. Le nom de l’opposant a été annoncé par un décret lu à la télévision publique, signé par le président de la transition, le général Brice Oligui Nguema. Cet économiste de 68 ans avait déjà été chef du gouvernement sous la présidence d’Ali Bongo entre 2012 et 2014. Il avait claqué la porte du parti au pouvoir en 2015, avant de passer à l’opposition. En exclusivité sur RFI, Raymond Ndong Sima est l’invité de Sébastien Németh.
RFI : Raymond Ndong Sima, quelle est votre réaction suite à votre nomination ?
Raymond Ndong Sima : Je ne m’attendais pas à être nommé Premier ministre de la Transition, mais j’avais dit depuis le départ que si j’étais mis à contribution, je le ferai de bon cœur. Donc, je pense que je vais faire l’effort pour travailler dans le sens de ce que tout le monde souhaite à l’heure actuelle, c’est-à-dire de remettre le pays sous les rails.
Est-ce que vous avez déjà une feuille de route ?
Le président de la République, le général Brice Oligui Nguema, m’a remis une feuille de route. Je n’ai pas encore eu le temps de la lire. Ce que je souhaite, c’est que le plus de monde soit mis à contribution pour que le processus soit inclusif, que nous nous mettions d’accord une fois pour toute, l’ensemble des Gabonais, quel que soit le bord auquel nous appartenons, pour nous mettre d’accord sur des textes qui soient justes, équitables et qu’il y ait des élections que personne ne contexte et dont la représentativité est évidente. Voilà ce que je souhaite, j’espère que tout le monde sera mis à contribution. Je ferai de mon mieux pour associer tout le monde, pour que nous fassions une bonne toilette de l’ensemble des textes qui sont sur la table. Il faut qu’au sortir de la Transition, le pays soit remis sur une trajectoire qui est satisfaisante pour tous, parce que à l’heure actuelle, nous jouons en dessous de notre capacité. Il faut qu’on se mette sur notre réelle capacité. Nous avons des ressources, des atouts, mais la façon de combiner, la façon de gérer, la gouvernance que nous avons faite n’est pas favorable, ne permet pas d’avoir la meilleure et la plus grande équipe. Donc, nous devons régler ce problème et de mon point de vue, tous ces problèmes sont liés au cadre juridique, à l’ensemble du contexte dans lequel nous vivons.
Cela veut dire que vous allez proposer des réformes en profondeur ?
Cela veut dire que nous allons travailler avec l’ensemble des acteurs, c’est-à-dire l’ensemble des partis politiques, avec la société civile, bien sûr sous la supervision du comité transitoire militaire, nous allons travailler sur l’ensemble des textes pour que nous ayons une Constitution comme le président l’a dit le jour de sa prestation de serment, et des textes d’application, des textes réglementaires qui soient le plus objectif possible. C’est cela.
Un gouvernement d’union nationale, c’est votre souhait qui intégrerait notamment vos anciens collègues d’Alternance 2023 et peut-être aussi des membres du Parti démocratique gabonais (PDG) ?
Pour l’instant, ce que les militaires nous ont dit, c’est qu’il n’y a ni majorité ni opposition. Donc, je ferai une proposition avec un gouvernement qui intègre tout le monde. À charge pour le président et le comité transitoire de choisir si ça leur convient.
Que faut-il pour que cette transition ne déraille pas ?
Dès lors qu’on a annoncé le principe de l’association de tous, le principe d’une démarche inclusive. Je crois que chacun doit mettre un peu d’eau dans son vin, de telle sorte que nous parvenions à des compromis qui soient raisonnables et solides.
Comment appréhendez-vous le travail avec les militaires ?
Dans ma carrière, j’ai fait plusieurs opérations de restructuration d’entreprise. J’ai fait la restructuration de la CFG, la Compagnie forestière du Gabon, en 1991 à Port-Gentil. J’ai fait la première mise en concession du chemin de fer en 1999-2000, etc. Je suis habitué à des situations un peu difficiles du point de vue de la restructuration. Mais je crois que les militaires ont un avantage. Ce sont des gens structurés et pour lesquels les ordres se transmettent d’une façon qui est assez précise. Donc, je m’attends à ce que les militaires déterminent clairement ce qu’ils attendent de moi, et moi que j’exécute clairement ce que je dois faire. Et je m’attends aussi en contrepartie à ce qu’ils me dégagent des marges de manœuvre claires qui correspondent à l’objectif qu’ils se sont fixés et que tous nous partageons.
Oui, parce que j’imagine que vous n’accepterez pas de travailler n’importe comment, qu’il y aura quand même des conditions dans votre travail pour que vous puissiez remplir votre mission ?
Je pars du principe que si les militaires ont accepté d’enfreindre une règle importante chez eux, c’est qu’ils ont le souci de réussir. Parce que, s’ils échouent, ils auront fait tout cela pour rien, et ça entachera sérieusement leur carrière et la suite. Donc, je pars du principe que les militaires auront envie de réussir.
Source : Rfi