Niger : Olushegun Bakari dénonce le « kidnapping » du président Bazoum et assure que le Bénin est prêt à intervenir pour déloger les putschistes

Au Niger, l’ultimatum de la Cédéao prend fin dans trois jours. Dimanche 30 juillet, l’organisation sous-régionale a demandé la libération immédiate du président nigérien Mohamed Bazoum et le retour à l’ordre constitutionnel dans un délai d’une semaine, sans quoi elle se dit prête à prendre toutes les mesures nécessaires, y compris l’usage de la force. À trois jours de la fin de l’ultimatum, où en sont les discussions ? De quelle façon la Cédéao pourrait-elle intervenir militairement ? Olushegun Adjadi Bakari, le ministre des Affaires étrangères du Bénin, répond aux questions de Pierre Firtion.

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Au Niger, l’ultimatum de la Cédéao prend fin dans trois jours. Dimanche 30 juillet, l’organisation sous-régionale a demandé la libération immédiate du président nigérien Mohamed Bazoum et le retour à l’ordre constitutionnel dans un délai d’une semaine, sans quoi elle se dit prête à prendre toutes les mesures nécessaires, y compris l’usage de la force. À trois jours de la fin de l’ultimatum, où en sont les discussions ? De quelle façon la Cédéao pourrait-elle intervenir militairement ? Olushegun Adjadi Bakari, le ministre des Affaires étrangères du Bénin, répond aux questions de Pierre Firtion.

RFI : Olushegun Adjadi Bakari, une délégation de la Cédéao, menée par l’ancien président nigérian, Abdulsalami Abubakar, devait se rendre ce 2 août 2023 à Niamey. C’était la médiation de la dernière chance ?

Olushegun Adjadi Bakari : Je pense que cela correspond toujours à la vision portée par les chefs d’État de la Cédéao qui consiste à laisser la porte ouverte et à privilégier le dialogue. Donc médiation de la dernière chance… jusqu’à la dernière minute, il y a un ultimatum qui a été donné, et tant qu’on n’est pas au terme de cet ultimatum, toutes les voies permettant d’avoir une sortie, des solutions qui soient acceptables, seront utilisées.

On sait que l’ancien président, Mahamadou Issoufou, mène aussi des négociations en coulisses. Qu’est-ce qui est proposé aux putschistes aujourd’hui ?

Il y a un message qui a été très clair porté par les chefs d’État, qui est celui de dire : nous ne sommes pas dans un cas de coup d’État, et je pense que là-dessus, il faut que nous soyons tous d’accord. Il s’agit ici d’une prise d’otages, d’un kidnapping. Et lorsqu’on est face à une prise d’otages ou à un kidnapping, on n’est pas dans une négociation de propositions. L’objectif premier est de pouvoir faire libérer l’otage, et que l’otage revienne à une vie normale. Donc, dans le cas présent, l’objectif c’est de faire en sorte que le président Bazoum, président démocratiquement élu par le peuple nigérien, reprenne ses fonctions de président du Niger.

Vous avez encore l’espoir d’une sortie de crise apaisée et sans violence ?

Nous l’espérons, mais dans tous les cas, les valeurs démocratiques, les valeurs de préservation, de stabilité politique et de transition démocratique, devront prévaloir au sein de l’espace Cédéao. C’est le message que les chefs d’État ont porté et je pense que c’est très important de rester là-dessus.

Si les militaires refusent de rendre le pouvoir d’ici le 6 août, que peut-il se passer ?

Les chefs d’État, dans le communiqué de la conférence des chefs d’État, ont été très clairs : passé l’ultimatum, toutes les autres pistes seront envisagées, y compris le recours à la force.

Et s’il était décidé de recourir à la force, qui pourrait être chargé d’intervenir parmi les pays membres de la Cédéao ?

Je pense que l’objectif, c’est de tout faire pour qu’on n’arrive pas à cette solution, mais si cela devait arriver, je pense qu’il y a des mécanismes qui sont en place.

Est-ce que le Bénin pourrait envoyer un contingent de soldats dans le cadre de cette intervention armée ?

Bien sûr que le Bénin, en tant que membre de la Cédéao, comme les autres pays de la Cédéao, sont prêts à participer à la résolution de cette crise. Si on devait arriver à cette solution, ce qui serait déplorable – parce qu’en fait, en réalité, aujourd’hui, la piste de la négociation reste sur la table, reste prégnante, reste la plus envisagée -, mais dans le cas où on n’arriverait pas au terme de l’ultimatum, à une solution négociée qui serait la meilleure pour tous, il faudrait, bien entendu, envisager toutes les autres solutions, comme évoqué par les chefs d’État.

Vous le disiez, les chefs d’état-major des pays de la Cédéao sont réunis jusqu’à ce 4 août à Abuja. Leur mission, concrètement, c’est de parvenir à mettre sur pieds une force militaire et un plan d’intervention d’ici dimanche ?

Je pense que leur réunion fait partie de réunions régulières. Depuis un certain nombre de temps, il y a ce creuset des chefs d’état-major qui est en place. Ils ont l’habitude de travailler ensemble. Vous n’êtes pas sans savoir qu’il y a cette force en attente de la Cédéao, dont l’opérationnalisation a commencé déjà depuis un certain nombre de temps. Donc, je pense qu’opérationnellement, il y a déjà une convergence. Après, sur les détails de la façon dont les choses pourraient se passer, je pense qu’il y a des voix beaucoup plus autorisées que la mienne.

Les militaires au pouvoir à Bamako et à Ouagadougou ont prévenu qu’une intervention militaire au Niger serait considérée comme une déclaration de guerre à leurs deux pays. Est-ce que vous ne craignez pas qu’une intervention armée déclenche une implosion de la Cédéao, voire un conflit régional ?

S’il devait y avoir une intervention au Niger, il ne s’agit pas d’intervenir contre un pays. Il s’agit d’aller libérer une autorité démocratiquement élue, prise en otage par des personnes qui avaient la charge de sa sécurité. Donc, en réalité, on n’est pas dans le cas des fantasmes de guerre, etc., il s’agit d’aller libérer et de réinstaller un président régulièrement élu.

Par :Pierre Firtion/ Rfi

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