A 49 ans, Naftali Bennett devient le nouveau Premier ministre israélien après un règne inégalé de douze ans de Benyamin Netanyahou. Plus à droite que son prédécesseur, il accède cependant au pouvoir grâce à une alliance hétéroclite constituée de partis de droite, de gauche et du centre. Et même d’un parti arabe.
1. Businessman
Diplômé en droit, Bennett devient rapidement un entrepreneur modèle de la « start-up nation ». Il fonde en 1999 Cyota, spécialisée dans la lutte contre la fraude sur internet, qu’il revend en 2005 pour plus de 145 millions de dollars (120 millions d’euros). Il n’a que 33 ans. Il n’en reste pas là. Patron de Soluto, un service israélien d’informatique sur le cloud, il le cède en 2013 pour plus de 100 millions dollars. De quoi se consacrer à la politique.
2. Américain
Naftali Bennett est le fils d’immigrés américains venus s’installer en Israël au lendemain de la guerre des Six-Jours de 1967. Le jeune Naftali a gardé des liens étroits avec le pays d’origine de ses parents. C’est aux Etats-Unis qu’il mène l’essentiel de sa carrière de businessman à partir de 2000. Et l’on raconte que le tombeur de Benyamin Netanyahou avait l’habitude d’échanger avec celui dont il fut le bras droit en anglais, langue que « Bibi » parle également couramment.
3. Officier d’élite
Bennett fait office de gendre idéal israélien. L’homme d’affaires est également un ancien officier d’unité d’élite de l’armée. Il a servi dix ans au sein de la Sayeret Matkal, les commandos de l’état-major, puis de Maglan, une autre unité d’élite de Tsahal. De quoi afficher l’étiquette « sécuritaire » indispensable à l’accession au pouvoir en Israël. Bennett a également participé aux guerres du Sud-Liban et à l’opération « Raisins de la colère » de 1996. Il est alors mêlé à certaines interventions controversées, notamment des tirs d’artillerie contre un complexe des Nations unies à Cana, après que son unité ait essuyé des tirs de mortier. Des civils, réfugiés dans les bâtiments onusiens, avaient été tués.
4. Ex-bras droit
Naftali Bennett a dirigé le cabinet de Netanyahou, alors chef de l’opposition, de 2006 à 2008. C’est à cette époque, en janvier 2007, qu’il rejoint le Likoud. Mais la collaboration ne dure pas. Que s’est-il passé entre les deux hommes ? Certains commentateurs ont affirmé que la brouille aurait pour origine une mésentente avec Sara Netanyahou, l’épouse très influente de l’ex-Premier ministre. Naftali Bennett finira par quitter le Likoud en mai 2012 pour prendre le 6 novembre les rênes de la Maison juive, héritière du très vieux Parti national religieux disparu en 2008. Un tremplin très efficace.
© Fournis par L’Obs En avril 2016, avec Benyamin Netanyahou, dont il est alors le ministre de lâEducation. (ABIR SULTAN/AP/SIPA)
En avril 2016, avec Benyamin Netanyahou, dont il est alors le ministre de l’Education. (ABIR SULTAN/AP/SIPA)
5. Colon
Lorsqu’il quitte la direction du cabinet de Benyamin Netanyahou, Bennett devient durant deux ans directeur général de Yesha, le conseil des colons de Cisjordanie et de la bande de Gaza. La défense des colons devient sa marque. Pour lui, un Etat palestinien serait un « suicide national ».Cisjordanie : l’annexion de facto
6. « Shrapnel in the buttock »
Naftali Bennett ne prône ni plus ni moins que l’annexion des Territoires palestiniens. Il se fait remarquer en 2013 par une formule choc. Pour lui, abandonner les colonies israéliennes et créer un Etat Palestinien s’apparenteraient à une dangereuse opération chirurgicale. « J’ai un ami qui a des éclats d’obus dans les fesses [“shrapnel in the buttock”], et on lui a dit qu’ils pouvaient être retirés chirurgicalement, mais que cela le laisserait handicapé… Il a donc décidé de vivre avec. » Un résumé imagé de sa vision du conflit.
7. « Kippa sruga »
Naftali Bennett est un « porteur de kippa ». Entendez, un religieux. Mais, en Israël, chaque signe extérieur revêt un sens précis. Le nouveau Premier ministre israélien porte une kippa sruga (« tricotée »), celle des sionistes religieux. C’est la première fois qu’un Premier ministre la portera dans l’exercice de ses fonctions. Selon la petite histoire, c’est au début du mois de novembre 1995, quelques jours après l’assassinat d’Yitzhak Rabin par un extrémiste juif, que le jeune lieutenant des forces spéciales israéliennes aurait remis sur sa tête la kippa qu’il avait cessé de porter. « Tous les religieux se trouvaient injustement mis en accusation. J’ai voulu montrer que j’en étais moi aussi », aurait-il confirmé quelques années après.
8. « Mon frère »
Naftali Bennett accomplit le tour de force d’apparaître à la fois comme un homme fort… et débonnaire. L’une de ses marques de fabrique est d’appeler ses interlocuteurs « a’hi » (« mon frère »). Une interjection chaleureuse et informelle qui reflète aussi son désir de séduire non seulement les religieux mais également un public jeune, laïc, qui parvient à se reconnaître dans cet homme souriant et simple.
© Fournis par L’Obs A la sortie dâun bureau de vote à Raanana lors des élections de janvier 2013, à lâissue desquelles il fait son entrée à la Knesset, le Parlement israélien. (ARIEL SCHALIT/AP/SIPA)
A la sortie d’un bureau de vote à Raanana lors des élections de janvier 2013, à l’issue desquelles il fait son entrée à la Knesset, le Parlement israélien. (ARIEL SCHALIT/AP/SIPA)
9. Expérience
Naftali Bennett arrive au poste de Premier ministre avec une vaste expérience. Il a été ministre des Affaires religieuses, de l’Economie, de la Diaspora, de l’Education de 2015 à 2019. Il a aussi détenu le portefeuille de la Défense, de novembre 2019 à mai 2020.
10. Pragmatique
C’est grâce à une alliance hétéroclite de partis de droite, de gauche et du centre que Naftali Bennett vient d’obtenir la confiance du Parlement israélien, la Knesset, en tant que Premier ministre pour les deux prochaines années – il laissera ensuite la place à Yaïr Lapid (centre gauche). Pour la première fois, l’accord de coalition inclut un parti arabe, Raam, dirigé par Mansour Abbas. Accusé de trahison par les tenants de l’extrême droite et les partis orthodoxes, Bennett est apparu aux yeux de l’opinion publique comme un homme plus pragmatique qu’on ne l’aurait cru.