Retour de Talon au Bénin après son exil : Réckya Madougou fait des confidences et tacle ‘‘Agbonnon’’

Le jeudi 8 octobre 2015, Patrice Talon mettait fin à trois ans d’exil en France, conséquence de son clash avec son ancien allié,  Boni Yayi. Ce jeudi 2 août 2018 au Centre de documentation et d’information juridique, Reckya Madougou a livré les secrets du rôle joué par sa personne dans ce dossier, affichant au passage ses déceptions vis-à-vis du régime du Nouveau départ…

Le jeudi 8 octobre 2015, Patrice Talon mettait fin à trois ans d’exil en France, conséquence de son clash avec son ancien allié,  Boni Yayi. Participant à l’atelier national sur l’engagement des femmes en politique, ce jeudi 2 août 2018 au Centre de documentation et d’information juridique, Reckya Madougou a livré les secrets du rôle joué par sa personne dans ce dossier, affichant au passage ses déceptions vis-à-vis du régime du Nouveau départ.

Manassé AGBOSSAGA

Reckya Madougou a tout mis  dehors. L’ancienne ministre de la microfinance a dévoilé les tractations qui ont facilité le retour au bercail de Patrice Talon sur sa terre natale après son long séjour d’exil. Dans ses confidences, elle a mis un accent particulier sur le rôle joué par sa personne dans ce dossier.

L’actuelle conseillère du président togolais a révélé comment elle est entrée en scène pour servir d’intermédiaire entre les protagonistes qu’étaient à l’époque Boni Yayi, et Patrice Talon, d’une part, et les facilitateurs,  qu’étaient les présidents Faure Eyadéma  du Togo et Alassane Ouattara de la Côte d’ivoire.

«…  ils (Ndlr: Les présidents ivoiriens et togolais) se sont dit, trouvons quelqu’un,  en qui nous avons confiance, en qui  le président Boni Yayi aussi a confiance pour nous servir de couloir de transition.

C’est comme ça nuitamment,  dans une période d’orage, j’ai pris un avion qui a fait le tour. On a quitté Bia, c’est au nord du Togo. Pendant que Patrice Talon et son épouse étaient à Bia, j’ai fait le tour. L’avion a failli  crasher ce jour là. J’ai  laissé mes enfants pour le faire en pleine nuit.

Le président Boni Yayi ne voulait rien entendre. Il ne décrochait plus les appels de ses pairs. Il a fallu que j’appelle Rachel, sa fille.  J’ai dit Rachel, je dois parler à papa, parce que  c’est compliqué.  J’ai la pression.

Quand je l’ai eu,  il (Ndlr: Boni Yayi) a dit,  ils m’ont eu. Ma fille,  tu peux venir. Sinon il ne voulait recevoir personne.

J’ai ensuite quitté le nord du Togo. J’ai pris l’avion ce jour là. Je suis allée voir le président Ouattara. Je lui ai rendu compte.

C’est comme ça,  et c’est seulement après cela, que le président Patrice Talon a pu rentrer…  J’espère que cela ne vous a pas échappé. Lorsque le président Patrice Talon a été élu, vous vous rappelez avant qu’il ne prête serment dans quel pays il a été. Si vous avez vu la vidéo, cela veut tout dire », a révélé Reckya Madougou à l’assistance.

Dans ses confidences, elle ne s’est pas  arrêtée là. Reckya Madougou poursuit et mentionne d’autres actions menées par sa personne au lendemain de la venue de Patrice Talon pour lui faciliter la vie. Et à en croire ses propos, elle a été d’une grande aide à ce dernier lors du second tour de la présidentielle de 2016, et  de la cérémonie d’investiture.

«… à l’entre des deux tours,  il  a fallu parler à des chefs d’Etat, non pas seulement de la sous-région, mais centrale. Là, c’est vraiment des négociations de très haut niveau…

Même le jour de la prestation de serment jusqu’à cinq heures du matin,  j’étais en éveil,  je n’ai pas dormi toute la nuit,  parce que l’équipe de Patrice Talon n’arrêtait pas de me téléphoner pour dire qu’ils ont besoin de ci, de ça. Ils ne faisaient pas confiance à tout ce qui était ici. Donc des fauteuils, le pupitre, …,  j’envoyais », ajoute t- elle.

Outre Patrice Talon, l’ancienne ministre de la microfinance révèle que la garde rapprochée de l’ex magnat du coton a bénéficié de ses services.

« Il y a des gens qui sont témoins. Vous pouvez parler avec Charles Toko. Vous pouvez parler avec Olivier Boko. Vous pouvez parler avec Eustache Kotigan. Tous savaient prendre le véhicule de Cotonou pour venir me voir à Lomé pour que je leur règle leur problème », confie Reckya Madougou.

Déception

Pour Reckya Madougou, la reconnaissance de ses nombreux efforts n’a pas été, par la suite, au rendez-vous. Elle dit d’ailleurs regretter tout  le risque pris gratuitement.

« Aujourd’hui,  je regrette parce que j’aurai fait une négociation en disant,  écoute je fais ça, en retour j’ai ci, j’ai ça comme le font  les hommes à chaque fois… », se plaint Reckya Madougou.

Face à cette mauvaise expérience, elle annonce un changement  avec toux ceux qui souhaitent solliciter ses services.

« Désormais, mon lobbying je vais le vendre  très cher. Mon carnet d’adresse,  je vais le vendre très cher », prévient  l’ambassadrice du concept ‘‘ne touche pas à ma constitution’’.

Tacle

Dans ses déballages, Reckya Madougou a saisi la perche pour tacler le régime du Nouveau départ et son chef ‘‘Agbonnon’’. Depuis Lomé où elle se trouve désormais de par ses charges, Reckya Madougou dit observer un régime ethnocentrique, mais également  qui ne fait pas la promotion de la femme.

 « Ce pouvoir,  les deux problèmes que j’ai relevés  dès le début,  c’est le sort réservé aux femmes,  et le repli ethnique. La réponse m’a davantage fracassé, quand j’ai entendu le président lui-même justifier son choix par le fait qu’en vérité faire la promotion de la femme, ce n’est pas fait la promotion du mérite. J’ai failli l’appeler pour dire quand il a fallu trouver une personne capable de te faire rentrer,  il se fait comme par hasard, que c’est une femme.

Deuxièmement,  vous faites un repli ethnique. Aujourd’hui, nous sommes tous des béninois, mais quand il a fallu t’aider à plusieurs reprises,  il a fallu une femme d’une certaine  région » a-t-elle déploré.

L’ancienne ministre de la microfinance de Boni Yayi a aussi fustigé l’opération de libération des espaces publics, qui dit-elle a touché les activités des femmes.

A ceux qui pourraient se demander pourquoi ces déballages, Madougou répond « J’en parle, parce que je me dis, en fait, la politique,  c’est fait pour des gens cupides. Ce n’est pas fait pour des femmes comme nous ».

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