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43ème Congrès de l’AIMF : L’intégralité du discours d’ouverture du Secrétaire permanent Pierre Ballet

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Le Secrétaire permanent de l’Association Internationale des Maires Francophones était à l’ouverture des travaux du 43ème Congrès du creuset qui se déroule à Cotonou du 11 au 14 octobre 2023. Voici ci-dessous l’intégralité de son allocution d’ouverture.

Monsieur le Ministre

Mmes et Mrs les représentants du corps diplomatique

Mmes et Mrs les élus locaux,

Mmes et Mrs les représentants des administrations centrales,

Chers amis,

Merci d’être là !

Merci à toutes et tous d’avoir ainsi manifesté, en grand nombre, en étant présents ici à Cotonou !

Vous êtes ou vous serez près de 400, 105 délégations de 33 pays,

205 élus locaux. Une grande famille qui se retrouve pour parler de nos programmes, de nos réseaux et d’une thématique de société importante, les Arts de la rue.

« La rue est le cordon ombilical qui relie l’individu à la société » disait

Victor Hugo. C’est signifier combien le soutien apporté aux arts de la rue est une politique culturelle des villes.

Ils portent également en eux une vision du monde où les mots corps social, tissu urbain, art public, qu’il soit ou non éphémère comme le sont les murs de façade peints, ont tout leur sens. Les fresques de Cotonou en sont la preuve.

Les arts de la rue sont davantage qu’une catégorie spécifique du spectacle vivant : ils sont une démarche artistique globale, un véritable creuset, porteur d’un dialogue et de rencontres entre les disciplines artistiques et les populations locales. Et j’en ai pris la mesure lors de mon dernier déplacement à Tunis et Cotonou, ville de culture par excellence, nous en fera très bientôt la démonstration.

Les arts de la rue présentent donc cette caractéristique très importante qui est le contact direct avec les populations. Ils permettent, avec leur diversité de langage – du monde forain au burlesque en passant par le sport – de dépasser l’obstacle de l’intimidation sociale qui existe souvent lorsqu’il s’agit de franchir la porte d’un théâtre ou d’un lieu de culture, quel qu’il soit.

Grace aux arts de la rue, une collectivité locale peut affirmer sa politique de démocratisation et de partage du geste artistique avec les populations. Une politique essentielle pour favoriser le rapprochement des femmes et des hommes porteurs de cultures différentes. Une politique essentielle pour favoriser l’appropriation du territoire et la paix sociale.

Encore faut-il qu’il y ait des espaces de rencontre ! Les arts de la rue me ramènent donc à la préoccupation qu’a l’AIMF pour l’urbanisme, l’espace public et les valeurs qu’il porte. L’espace public, quel qu’en puisse être sa forme, rue, place, friches, rassemble et permet de diffuser largement : parce qu’il appartient à tous, il agrège et fédère de nouveaux publics. Dans l’espace public, en effet, nous sommes libérés de tous les codes sociaux qui peuvent s’attacher au rituel d’une représentation de théâtre, d’opéra ou de danse. Nous sommes d’une certaine manière plus libre, moins conditionnés pour la réception du spectacle qui nous est proposé.

C’est pour cet ensemble de raisons que les arts de la rue, plus encore que d’autres formes d’expression artistiques, ne peuvent être dissociés des enjeux urbains, architecturaux, et des questions sociales qui intéressent un territoire, une ville, un quartier.

Mesdames Messieurs les Maires ils nous appartient donc de cultiver l’extraordinaire, la surprise, l’émerveillement au coeur du quotidien.

Il nous appartient aussi de faciliter l’échange de savoir-faire et de former les acteurs pour accroitre la valeur intrinsèque de leurs témoignages.

Mais, aujourd’hui, nous ne pouvons en rester à ce seul message.

Chers Amis, il m’appartient, à ce moment, de rappeler que le thème de ce Congrès s’inscrit dans un contexte plus global et m’est impossible de le passer sous silence

En effet, la rencontre de Cotonou intervient à un moment bien particulier dans les relations internationales. Celui d’une recomposition accélérée de l’échiquier international, qui va de pair avec la volonté de laisser derrière nous, enfin, une perception et des attitudes vis-à-vis de l’Afrique qui ne sont plus acceptables. Avec un réseau composé aux 2/3 de villes africaines, avec l’histoire qu’elle porte en héritage, celle de la colonisation, l’AIMF est bien sûr traversée par ces débats et par cet espoir d’un changement réel et définitif.

Ces enjeux, et vous le savez tous ici, sont pour nous depuis des années un cheval de bataille. Que ce soit dans le fonctionnement de nos institutions ou dans la manière dont nous travaillons ensemble autour des projets portés par les villes, nous nous attachons chaque jour à construire une autre coopération, une autre manière de voir et de faire. En partant des demandes des villes pour construire notre programme d’action (et non l’inverse), en donnant la priorité à l’expertise du Sud, en soutenant la coopération sud-sud et le dialogue sous régional… Cette démarche, qui est la nôtre, a quelque chose à dire au monde, et l’état d’esprit qui porte la coopération que nous construisons ici ont, il me semble, quelque chose à dire au monde. Nous devons en être fiers, le faire savoir, et nous servir de cette base pour transformer les choses en activant tous les leviers à notre disposition.

Je veux, qu’il soit dit, ici, que nous ne devons pas nous satisfaire de cette démarche que nous avons construite et qui devrait en réalité simplement être la norme. Nous devons aller encore plus loin, continuer de faire de l’AIMF cet espace d’ouverture à l’autre, où nous remettons en cause nos certitudes et où nous bousculons nos habitudes. La Déclaration de Cotonou qui doit être adoptée demain, mais aussi la programmation stratégique qui sera soumise à votre vote, doivent être l’expression de notre volonté de porter encore plus loin le changement. Elles doivent être le reflet du message que nous entendons porter au monde en matière de coopération. L’expression de notre diplomatie, de notre capacité à être une force de changement pour les relations internationales.

A cet égard, permettez-moi d’insister sur quelques points clé du projet de programmation que vous avez reçu, et autour duquel nous avons déjà eu l’occasion d’animer des échanges :

– Tout d’abord l’état d’esprit de notre coopération, que nous devons approfondir si nous voulons continuer d’être cette force de changement pour les relations internationales, et que nous devons rendre visible à travers une communication engagée des Maires. Il faudra pour cela nous saisir, en plus des sujets techniques, de sujets « politiques » : l’importance de renforcer la coopération sud-sud et le dialogue régional, d’approfondir la diplomatie des villes, les questions de lutte contre la désinformation, la capacité à associer les diasporas à notre coopération…

– Il y a aussi le fonctionnement de nos instances. Celles-ci doivent être dynamiques et ne pas se refermer sur elles-mêmes.

Ce que nous souhaitons atteindre notamment avec l’appui des commissions permanentes, qui vont avancer vers un fonctionnement plus ouvert pour permettre une participation élargie des membres de l’AIMF.

– N’oublions pas l’utilité de notre coopération : cette question de l’utilité est au cœur des débats actuels. La coopération décentralisée et utile aux habitants et change leur vie. Ce modèle que nous avons construit doit fédérer plus largement et être soutenu fédérer autour de notre coopération à impact et mobiliser plus largement des soutiens à notre action. La coopération décentralisée ne doit plus se limiter à l’envoi d’experts du nord vers le sud mais de mieux comprendre les aspirations du sud pour leur apporter une solution. L’AIMF est utile car l’essentiel de son action est concret.

– Enfin et surtout, notre volonté d’ouverture. Vous le savez, depuis que j’ai pris mes fonctions j’ai toujours veillé à ce que l’AIMF ne soit pas un club vivant de l’entre-soi. Et cette ouverture je la souhaite aussi pour les bailleurs… A cet égard, après l’appui que nous recevons de la Fondation Bill et Mélinda Gates, nous venons de signer un partenariat avec la GIZ.

Voilà, Excellences, ce que je souhaitais porter à votre réflexion en cette ouverture de Congrès.

Encore une fois, merci de nous avoir rejoints.

Cela fait chaud au cœur !

Merci infiniment à toutes et à tous.

Merci à Cotonou d’avoir tant fait pour que tout se passe bien.

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