Pour réformer un Etat, les 10 conditions déterminantes de base
Une réforme bien pensée et intelligemment bien conduite est un processus de stabilisation d’un Etat et participant (i) à la vraie démocratie par la co-construction de l’offre d’innovations et (ii) à un réel Etat de droit car la réforme est produite avec l’opinion publique, les différents corps sociaux incluant les forces syndicales et les partis d’opposition. Une réforme sans consultations et dialogues est un projet de changement sans base sociale.
1/ Doter l’Etat d’un programme national intégré de réformes publiques avec sa théorie du changement pour bien cibler les défis à relever et les pas de temps des transformations sociales à observer ;
2/ Mettre en place un plan de communication du processus de production des innovations et de changement de comportements ;
3/ Définir des mesures et actions à impact rapide* pour mobiliser et obtenir l’adhésion des citoyens, puis des actions structurantes de changement à efficacité impactante et progressive génératrices d’autonomie collective;
4/ Recruter sur la base d’enquête de moralité une équipe d’administrateurs de réformes qui assure la gouvernance, notamment le pilotage sur la base d’un tableau de bord pour le suivi et l’évaluation, obéissant à une politique globale de la qualité des innovations. Etre réformateur en chef exige des compétences éthiques et des compétences managériales reposant sur le compagnonnage, la coordination, l’impulsion, l’humilité, l’ouverture d’esprit et l’assurance qualité;
5/ Réaliser la capitalisation et la modélisation des procédés, des outils et des facteurs ayant permis la réussite d’une réforme à chaque étape de son implémentation. Toute réforme publique réussie est une transformation sociale qui doit se poursuivre par des améliorations continues pour échapper à l’obsolescence afin d’assurer la continuité de l’Etat;
6/ Disposer d’un réseau d’animateurs de réformes formés qui assurent les relations publiques et le dialogue de gestion du changement à l’interne et à l’externe avec les usagers. Chaque animateur promeut les innovations, fait de la psychologie non violente et non mensongère pour collecter les satisfactions et les insatisfactions sur tous les points critiques du protocole de conduite de changement, surtout les *innovations incrémentales* et les innovations de rupture demandant des talents de pédagogue pour convaincre et ne chercher jamais à vaincre en introduisant des comportements militarisés dans l’animation des innovations. Quand vous brutalisez les citoyens pour une réforme, la durée de vie des innovations sera celle d’un ou deux mandats présidentiels. L’hypocrisie ou la résistance insidieuse aux changements s’installe quand une réforme maintient les citoyens sous l’emprise stressante de la peur et des incertitudes. Les citoyens n’aiment pas une réforme de l’Etat conduite avec arrogance, suffisance et mépris.
7/ Instituer la réalisation d’enquêtes de satisfaction auprès des citoyens pour ajuster les méthodes, les rythmes et l’offre de services publics de réforme;
8/ Admettre que toute réforme publique doit intégrer le système éducatif national comme un intrant pour l’éveil de la jeunesse et faire de ce système *le canal d’éducation au développement humain durable et un vecteur de construction de la fierté nationale* dans chaque domaine d’innovations ;
9/ Lutter contre la corruption dans toute la chaîne de production d’innovations et de façon continue afin d’éviter la pollution morale et éthique. L’intérêt général et le bien commun restent la motivation principale de toute réforme publique. Le risque est grand que certains politiciens au sommet de l’État cherchent à se servir des réformes publiques pour des profits personnels. La vigilance est de mise pour ne pas discréditer le processus de réformes publiques ;
10/ Prendre des mesures pour garantir le financement sécurisé de chaque innovation avec les procédures comptables et de redevabilité requises.
Est-ce que les réformes publiques au Bénin répondent à ces préalables?
Chacun connaît bien la réponse et j’ai la mienne.
Réformer, c’est une remise en forme, un reformatage par la formation, l’information, l’expérimentation continue avec un passage à l’échelle basé sur la consommation d’innovations institutionnelles, technologiques, financières, économiques, sociales garantissant une sécurité humaine continuellement enrichie en valeurs de civilisation humaine. Il n’y a d’inculturation du développement qu’au prix de ce renouvellement continu des pratiques sociales.
Simon-Narcisse Tomety
Institutionnaliste de réformes publiques