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Intolérance face au mariage interreligieux dans le Borgou et la Donga : Terreau fertile à l’extrémisme violent !

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Le mariage interreligieux est l’union entre deux personnes de confessions religieuses différentes. Très souvent dès l’annonce, les deux amoureux sont confrontés au refus de certains parents et leaders religieux. Dans les départements du Borgou et de la Donga, le mal gangrène et nourrit des intentions d’extrémisme violent.

« Evangélique, j’étais follement amoureuse d’un musulman. Il a décidé de me prendre en mariage. Un soir en assemblée avec notre pasteur, ils m’ont annoncé que notre union ne peut être possible puisque nous ne partageons pas la même foi. C’est ainsi que mon rêve s’est brisé.», affirme Dame Bernice, coiffeuse à Parakou.

Certaines religions tiennent leurs règles sur le mariage comme émanant de Dieu ce qui justifie généralement leur hostilité au mariage interreligieux. Chez les évangélistes, une personne professant une foi différente est considérée non apte au mariage. Pour Uriel M’Pinti, pasteur d’une église évangélique « tout mariage dans l’église doit être fait dans le corps du christ.

Dieu a tiré la femme de l’homme donc obligatoirement les deux doivent professer la même foi pour faciliter leur union.» Tel est également le cas en islam. Une musulmane ne peut s’unir à un non musulman. « La musulmane ne doit en aucun cas se marier à un non musulman. Ce sont les prescriptions divines qui le disent. Si cela advenait par ignorance, on l’informe, on l’éduque et le divorce est prononcé. », martèle l’islamologue Issa Awali.

Du point de vue sociologique

Le socio anthropologue Ibrahima Abdou constate et affirme que les religions modernes ne peuvent être vécues comme venues de l’occident. Selon lui, les leaders religieux devraient œuvrer à garantir la morale religieuse. De toute façon, l’intolérance des parents ou leaders religieux face au mariage interreligieux a d’énormes conséquences sur les confessions religieuses.  « Généralement lorsqu’ils s’aiment vraiment et qu’ils ne peuvent pas se séparer et qu’il n’y a pas eu de tolérance, les gens quittent les églises. Ça peut expliquer le fait que parfois les églises et les mosquées se vident. Lorsque les gens n’y trouvent plus leurs intérêts, ils n’y vont plus. », renchérit-il. Quelques jeunes rencontrés dans le Borgou et la Donga renforcent les propos du socio anthropologue. Ils estiment que les exigences et autres contraintes religieuses ne doivent pas prévaloir dans le choix du conjoint ou de la conjointe et seul l’amour devrait être privilégié. « Je suis désolé pour eux. Si jamais mes parents avancent comme raison la religion pour m’empêcher d’aimer un homme je ne pense pas pouvoir obéir.

S’ils tiennent mordicus, je suis capable de les renier», déclare Précieuse Adjalala, étudiante à l’Université de Parakou. « Je ne serai pas d’accord avec eux. Ça dépend de la compréhension entre mon ami et moi. S’il m’accepte en tant que chrétienne, il n’y a aucun problème ! Je suis même capable de me séparer d’eux pour vivre ma vie », ajoute Perpétue Kassa résidant à Djougou.

En sa qualité de conseiller matrimonial, Clément Yargo invite les amoureux à éviter l’usage de force en cas de refus ou d’opposition des parents. « En aucun cas, il ne faut s’opposer à ses parents. Il faut chercher à leur poser beaucoup de questions et comme c’est un sujet religieux,prier beaucoup.», recommande –t-il. Quant aux parents et leaders religieux « c’est d’écouter et de conseiller et non de juger et de condamner », a-t-il conclu.

Ce que dit la loi

A en croire Dr Soumaïla Abdou Tamou Sounon, enseignant de droit privé à l’Université de Parakou « la loi ne fait aucune mention de la religion dans le processus du mariage.»

Ezéchias Biao, consultant sur les questions du droit sexuel et de la famille interprète autrement la loi. « Nous sommes dans un Etat qui prône l’égalité et qui réfute toutes formes de discrimination. Donc  le simple fait de considérer comme à part une religion dans un contexte aussi crucial qu’est le mariage, est déjà une forme de discrimination punit par la loi.», précise-t-il.

Il n’est pas facile de renoncer à l’amour certes. Il n’est pas non plus aisé de renoncer à sa religion encore moins faire violence pour prouver son amour à l’être aimé. Seule une synergie d’action concoure à une solution efficace pour la consolidation de la paix.

Yaovi Angélo HOUNDJO & Jean-Luc EZIN

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