Angela Kpéidja fait face à plusieurs critiques depuis qu’elle a eu l’audace de dénoncer l’harcèlement sexuel en milieu professionnel. Ses détracteurs l’accusent de tout et de rien, critiquant au passage son style vestimentaire. Répondant à ces derniers, la journaliste en profite pour faire une confidence sur sa vie. Elle a été victime de viol à l’âge de 5 ans. Lire son émouvant témoignage
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Ils disent que j’ai eu ce que je méritais. Pour eux, je suis moi-même coupable des viols et harcèlements que j’ai subis. En cause mon habillement.
Pourtant, lorsqu’à 5 ans, j’étais victime pour la première fois d’un viol de la part de mon oncle, je n’avais pas encore conscience de mon corps ni même des vêtements que ma mère me portait.
Lorsque mon répétiteur me mettait sur ses cuisses pour se masturber tout en m’enseignant le syllabaire, je n’avais que 7 ans. C’était mon maître, c’est donc tout naturellement qu’il me soumettait. Cet après-midi là, ma surprise a été grande quand maman s’est inquiétée de notre posture. Plus jamais je n’ai revu ce maître.
A 17 ans, mon Bac en poche, j’avoue que j’avais déjà conscience de mon corps. J’étais habillée dans une robe en soie, fleurie, lorsque je suis allée à l’anniversaire de mon cousin sur le campus d’Abomey-Calavi. C’est mon grand-frère, mais il n’a pas hésité à me prendre mon innocence dans une grande violence. Cette belle robe dont je m’étais parée, a pris finalement de mon sang.
Des années après, le père de mes enfants m’a aperçue de dos, au Champ de foire de Cotonou. Selon ses aveux, c’est ma démarche rythmée qui l’aurait attiré. J’avais ce jour là une robe longue trapèze fendue à gauche et à droite. Elle était à la mode à l’époque.
En 1998, lorsque j’ai fait mes premiers pas dans les médias, j’étais déjà mariée et mère. La rubrique que j’animais m’imposait de m’habiller dans les couleurs de la communauté africaine que je me devais de faire découvrir aux téléspectateurs. Des grands boubous sénégalais aux saris de l’Inde, mes vêtements n’avaient rien d’indécent. Pourtant, j’étais déjà harcelée et quelques téléspectateurs se déplaçaient jusqu’à mon lieu de service pour me conter fleurette.
Sur Week-end Matin, j’ai choisi de vendre la « Béninoise ». Tin Mag, Welia et Lolo Andoche ont joyeusement rivalisé d’ingéniosité pour m’habiller. Welia particulièrement est un Guinéen et il aimait bien les manches longues. C’est à cette époque que j’ai connu les meilleurs profils de dragueurs ainsi que les plus subtiles harceleurs.
Aujourd’hui, sur mes émissions, j’allie invariablement le prêt-à-porter africain et ces marques qui nous viennent d’ailleurs. Robes, pantalons, jupes… Je porte de tout. Et c’est bien actuellement que j’ai les dragueurs et les harceleurs de tous bords.
Je vous dois un autre aveu. Côté vêtement, j’aime être coquette et chic. J’ai aussi des rondeurs que les vêtements n’arrivent malheureusement pas à cacher.
Ces rondeurs, à vrai dire, je ne sais à quel moment, j’ai pu les demander au créateur. Dans ma famille, je puis vous le confesser, j’en ai plus que toutes mes trois autres sœurs.
Dans les zones rurales et couvents, j’ai pu observer que les femmes et les jeunes filles, bien souvent, ne couvrent pas leur poitrine. Sont-elles autant harcelées ou violées ? Je n’en sais rien.
C’est quand même éprouvant de devoir se remettre en question. C’est tout aussi suicidaire d’être culpabilisé alors qu’on vient d’être dépossédé de ce qu’on a de plus intime.
Vous conviendrez avec moi, que personne ne se fait voler mais qu’on vous vole.